Annales des Mines (1877, série 7, volume 6, partie administrative) [Image 212]

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qualifier. Jamais, dans le régime économique, on n'a vu se produire un fait semblable. Pendant quelque temps, les constructeurs sont restés sans savoir ce qu'ils devaient faire, parce qu'ils avaient des engagements, des marchés à liquider. Puis ils ont eu des réunions fréquentes avec les maîtres de forges qui, eux aussi, faisaient des exportations. Ensemble ils ont examiné la situation, ils ont accumulé les arguments, et ils se disposaient à protester ; mais malheureusement, à partir du mois de mai, la situation des pouvoirs publics est devenue telle qu'il ne leur a pas été possible de faire entendre leurs réclamations: il a bien fallu qu'ils se soumissent. Plus tard, nous avons réussi a nous faire écouter. Enfin, depuis le commencement de cette année, sachant que le Conseil supérieur allait reprendre ses délibérations, les constructeurs et les maîtres de forge; se sont concertés. En ce moment, ils rédigent leurs observations, Ils feront connaître par écrit les plaintes qu'ils m'ont d'abord chargé de présenter ici de vive voix. M. Reverchon a fait remarquer qu'on avait laissé la fonte de côté pour ne toucher que le fer et la tôle. La fonte, en effet, se trouve sous le régime de l'équivalent. Il n'y a que les constructeurs employant le fer et la tôle qui, dans ce moment, sont dans une situation précaire. Je n'hésite pas à dire que leur situation est au moins aussi intéressante que celle des constructeurs qui emploient la fonte. Quand on emploie la fonte, qui vaut 7 ou 8 francs les 100 kilog., on y ajoute o',i5 ou o',i8de main-d'œuvre, et c'est tout ; tandis que quand nous empl oyons le fer. qui vaut 18 ou 20 francs les 100 kilog., nous y ajoutons une maind'œuvre représentant o',tio ou o',8o. La situation des fers et des tôles mérite donc quelque considération. J'ai présenté des évaluations que j'ai puisées dans les relevés des douanes. J'ai pris, non pas les tableaux du commerce général, mais ceux qui résument les importations temporaires. Il est incontestable, d'après les mouvements signalés par ces documents, que les importations ont diminué, pour le fer et la tôle, dans des proportions très-considérables,—jeles ai signalées hier,— tandis que. pour la fonte, les importations ont augmenté. On m'objecte que je n'ai considéré que les importations temporaires et que j'ai négligé le commerce général. Je ne me suis pas occupé du commerce général, parce que nous avons à discuter ici spécialement une question d'importation temporaire. Je ne puis pas croire qu'avec la différence considérable qui existe actuellement entre les prix des fers français et ceux des

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fers étrangers, l'exportation sous le commerce général soit praticable. Je ne m'explique pas que l'on puisse aller braver la concur rence des Anglais et des Belges avec des matières premières qui, en France, coûtent 5 ou 6 francs de plus que chez nos voisins. Le commerce général comprend l'exportation du fer, de la tôle, de la fonte,—matières qui rencontrent une concurrence dans tous les paysdumonde;—car enfin nous ne sommes pas seuls à alimenter les diverses nations. Or, il est évident que, si les concurrents que nous trouvons toujours sur les marchés étrangers ont les matières premières à meilleur prix que nous, ils doivent obtenir la préférence. Je ne concevrais pas comment, dans ces conditions, notre commerce général aurait augmenté, et je me demande comment les constructeurs français, dont la situation est moins bonne, pourraient l'emporter sur leurs concurrents étrangers. Le droit de 6 francs, a dit M. Reverchon, correspond à 3o p. 100. Autrefois le droit était de 12 francs pour des fers valant Z10 francs. Comme il y a eu dédoublement des deux côtés, la situation est restée la même. Le droit a été réduit de moitié; mais la valeur de la matière première a aussi diminué de moitié. Un mot de l'Allemagne. Je suis en relation avec les Russes, et je crois que la situation de la Russie provoque, de la part de l'Allemagne, les manifestations dont M. le ministre nous a parlé. On a dit,—et tous lesjournaux l'ont répété,— que dernièrement l'Allemagne, à raison des services qu'elle rendait à la Russie, avait demandé à cette dernière puissance d'introduire dans ses tarifs des modifications favorables aux produits allemands. Ainsi l'Allemagne voudrait que, en Russie, les droits de douane ne fussent pas exigibles en or. En somme, l'Allemagne désire des lois de douane telles qu'elle puisse avoir les marchés de la Russie. Les Anglais et les Russes sont, depuis quelques années, assez mal ensemble : les fournitures anglaises sont un peu mises au ban des chemins de fer et de l'industrie métallurgique en Russie. Les Belges, à cause des mauvais produits qu'ils livrent, sont écartés assez généralement des marchés russes. Sur ces marchés, les Français seuls se trouvent en véritable lutte avec les Allemands. Si l'Allemagne obtenait que l'on supprimât les importations temporaires, les acquits-à-caution, si nous étions empêchés d'avoir le fer au même prix que les Belges et les Anglais, nous serions exclus du marché russe : les Allemands y domineraient en maîtres. Nous ne fournissons presque rien à l'Allemagne. Les fournitures dont on a parlé, et qui ont été faites par M. Roger, sont une exception. Nous n'avons rien à retirer de l'Allemagne. Il ne faudrait