Annales des Mines (1910, série 10, volume 18) [Image 208]

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DE

LA

CONCURRENCE

EN

MATIÈRE

DE

DISTRIBUTIONS

C'est ainsi encore, et dans un cas opposé, qu'un concessionnaire ancien ne peut se prévaloir de la clause relative à l'égalité des conditions prévues par l'article 8 si une clause du même genre n'a pas été insérée dans le contrat duquel il tient ses droits. La question s'est posée à Lyon sous une forme particulièrement intéressante : La ville de Lyon avait, avant la loi du 15 juin 1906, traité avec un concessionnaire. Dans le cahier des charges de cette concession, il était stipulé que tous les concessionnaires ultérieurs seraient soumis aux mêmes charges et redevances, et astreints aux mêmes obligations que le concessionnaire primitif. Cette obligation avait été sanctionnée par le Conseil d'État, un décret du 22 janvier 1898 avait approuvé un cahier des charges type applicable à toute entreprise de la ville de Lyon, et contenant la clause d'égalité entre tous les concessionnaires. Vint la loi du 15 juin 1906, puis le décret du 11 octobre 1907; il se trouva que les charges et redevances jadis imposées par la ville étaient en contradiction avec l'article 9 de la loi, avec les articles 1 et 3 du décret. L'ancien cahier des charges prévoyait une redevance de 6 francs par kilomètre de ligne et par an pour frais de contrôle, tandis que le décret du 17 octobre 1907 n'admet comme maximum que 5 francs par kilomètre et par an. Les redevances pour occupation du domaine public communal étaient calculées à raison de 0 f ,05 ou 0f ,10 par mètre courant de tranchée, tandis que le décret du 17 octobre 1907 fixe le maximum à 0 f ,04; le cahier des charges ancien prévoyait au profit de la ville un prélèvement de 6 0/0 sur les recettes brutes du concessionnaire, tandis que le décret du 17 octobre 1907 fixe un prélèvement maximum de 4 0/0, etc. Que le concessionnaire primitif restât soumis en prin-

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cipe, malgré la loi de 1906, aux conditions de son cahier des charges, cela ne pouvait faire doute ; mais devait-il en être de même d'un nouveau concessionnaire avec lequel la ville était en pourparlers au moment du vote de la loi? La ville prétendit qu'elle était en droit d'invoquer l'article 26 de la loi : « Sont maintenues dans leur forme et teneur les permissions accordées par des actes antérieurs à la présente loi », parce que le traité nouveau était contenu en germe dans l'ancien traité, lequel prévoyait expressément l'égalité de charges entre tous les concessionnaires présents et à venir. Cette thèse était difficile à soutenir. La ville de Lyon ne saurait se soustraire à perpétuité aux dispositions de la loi, en vertu d'un cahier des charges ancien. Mais si elle appliquait au nouveau concessionnaire les charges moindres que prévoit le décret du 17 octobre 1907, elle allait se trouver exposée aux réclamations de l'ancien concessionnaire, voulant jouir du traitement de l'exploitant le plus favorisé. Le droit du concessionnaire ancien n'était, en effet, pas douteux, non pas, nous le répétons, à cause de l'article 8 de la loi de 1906, mais à cause de la clause spéciale inscrite dans son contrat. La ville de Lyon décida de passer avec le nouveau concessionnaire un traité conforme à l'ancien cahier des charges et le préfet, à qui fut soumis le traité, crut pouvoir l'approuver tel quel, c'est-à-dire admettre que la concession nouvelle fût soumise aux mêmes charges et conditions que la concession ancienne. Les tribunaux ne se sont point encore prononcés sur la validité du nouveau traité, mais nous pensons que cette solution catégorique va nettement à l'encontre des dispositions de la loi de 1906 et qu'elle expose la ville aux plus sérieuses contestations.