Annales des Mines (1908, série 10, volume 13) [Image 55]

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LE PETROLE DE ROUMANIE

Il reste à expliquer toutes ces particularités. On a songé tout d'abord à établir une corrélation entre le pouvoir dextrogyre du pétrole et celui constaté dans un assez grand nombre de substances d'origine végétale (produits de distillation de l'ambre, des lignites, dissolutions de certaines résines fossiles) ; on a même cru pouvoir en déduire l'origine végétale des pétroles. Cette assimilation est peut-être hasardée; les produits auxquels on fait allusion n'ont que des rapports lointains avec le pétrole. 11 importe d'ailleurs d'être très réservé sur les analogies à établir entre la substance mère et ses dérivés par distillation : le pouvoir rotatoire de ces derniers peut être tout différent de celui de la substance dont ils dérivent ; le baume de Canada par exemple, qui dévie à droite de 52 degrés, donne par distillation une huile qui dévie à gauche de 135 degrés (*). On a invoqué l'action de certains produits dérivés de l'albumine : leur influence peut certainement entrer en ligne de compte, mais l'école organique elle-même attribue à ces substances un rôle très secondaire dans la formation du pétrole ; ils doivent intervenir pour une faible part dans la cause des phénomènes observés. On a mis en avant l'influence de certaines bactéries, invoquées parfois comme agent de production des pétroles ; l'hypothèse n'est pas insoutenable, mais ne repose sur aucun fait d'expérience. Les observations récentes du chimiste Marcusson sur les propriétés optiques des dérivés de la cholestérine, produit de transformation des corps gras, conduisent au contraire à des analogies intéressantes. Cet auteur a vérifié que les matières grasses renfermant la cholestérine donnent, par distillation au laboratoire, un pétrole (*) La même objection ne peut être formulée pour la cholestérine ; on se borne en effet à comparer au pétrole les produits obtenus par la distillation de cette substance.

ET LE CONGRÈS DE BUCAREST

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dextrogyre; d'autre part (expériences d'Engler), si l'on part de la cholestérine, qui, à l'état naturel, estlévogyre, on peut en obtenir, en variant les conditions de la distillation, des produits actifs de natures très diverses. La distillation dans le vide donne des produits lévogyres. Si l'on opère à la pression ordinaire en élevant brusquement la température, on obtient un produit dextrogyre ou faiblement lévogyre ; ce produit, soumis à la rectification dans le vide, donne tout d'abord des fractions lévogyres, puis inactives, et enfin, pour les fractions à points d'ébullition élevés, des produits dextrogyres très actifs. Si, enfin, la distillation est conduite lentement à la pression ordinaire, on obtient une huile nettement dextrogyre (+ 120 degrés); celle-ci, rectifiée dans le vide, donne les résultats suivants : DISTILLATION DE LA

POT.NTS

D EBUT.LITION

(15 millimètres de mercure)

100-193 193-230 230-245 245-250 250-258 258-270 270-275 275-280 280-288 au-dessus de

1

CHOLESTÉRINE.

POUVOIR ROTATOIRE

— 1,2 + 57,6 -f 88,0 + 104,0 + 108,0 4- H8,0 4- 128,0 4- 144,0 + 164,0 résidu négligeable

M. le professeur Engler a composé, d'autre part, une huile artificielle très faiblement active, formée d'un mélange de produits inactifs (huiles de graissages, vaseline, paraffine) et d'une certaine quantité de cholestérine soumise à la distillation lente à la pression ordinaire. En variant la proportion du mélange, il a obtenu deux échantillons, présentant, l'un un pouvoir rotatoire dextrogyre de 4 degrés, l'autre un pouvoir dextrogyre de 1,5 degré. Les résultats obtenus à la distillation furent les suivants :