Annales des Mines (1908, série 10, volume 13) [Image 47]

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LE PÉTROLE DE ROUMANIE

ET LE CONGRÈS DE BUCAREST

minimum des dépenses [lever des plans, frais de timbre, frais de déplacement de la commission (*)] se monte à 150 francs par hectare et s'élève parfois à 200, 400 et même 800 francs : ces dépenses arrivent à dépasser le prix du terrain. Plusieurs Sociétés ont préféré renoncer au bénéfice de la loi, et trancher à l'amiable, fût-ce au prix de quelques sacrifices, les différends éventuels qui pouvaient ultérieurement surgir. La Commission n'est pas tenue de procéder à une enquête sur place : elle peut se borner à citer les voisins réclamants, et se prononcer sur le simple examen du plan annexé à la demande. Ce mode de vérifications est critiquable : bien des petits propriétaires, peu familiarisés avec la lecture des plans, se trouvent de cette façon dans l'impossibilité de défendre efficacement leurs droits. La loi stipule l'obligation de l'inscription de l'acte sur le registre du Tribunal du district; elle est beaucoup moins nette en ce qui concerne l'inscription sur le registre, de la commune; celui-ci, en général, n'existe pas. Cotte lacune ouvre la porte à bien des abus : un terrain peut se vendre une et plusieurs fois sans que la partie prenante puisse s'en rendre compte. On pourrait à la rigueur découvrir le fait en consultant le registre du Tribunal; mais ce dernier comprend plusieurs volumes : les actes y sont inscrits à leur date et sans distinction de commune ; toute vérification y est matériellement impossible. Un député pouvait dans ces conditions interpeller le Ministre de la Justice, en 1906, sur « l'impunité dont jouissent encore des individus qui, à l'abri de la loi de consolidation, " (*) Celle-ci touche 65 francs par demande ; une demande peut comprendre une ou plusieurs concessions, jusqu'à concurrence d'une superficie totale de 10 hectares. Depuis le 1" septembre 1904 jusqu 'au 15 juin 1905, la Commission avait eu à statuer sur 54 demandes, dont 38 au-dessous de 10 hectares : les sommes touchées avaient été de 6.750 francs, soit 123 francs en moyenne par demande.

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continuent sans aucun frein leurs agissements antérieurs. Malgré la disposition de la loi qui punit du délit d'escroquerie le fait de vendre deux fois le même terrain, on rencontre aujourd'hui, dans tous les villages et hameaux du district de Prahova, une foule de courtiers et d'escrocs qui arrivent à trafiquer vingt fois des terrains pétrolifères ». Le Ministre répondait : « L'observation est fondée : la loi de consolidation est défectueuse ; elle ne sauvegarde pas les intérêts des particuliers et compromet le prestige des magistrats. Un projet de modification est à l'étude... » Ce projet a été déposé parle Gouvernement en avril 1906 : il devait être étudié en 1907 ; les troubles agraires ont obligé d'en différer la discussion.il laisse la loi intacte dans ses grandes lignes, mais la modifie sur des points de détail. La transcription sur le registre de la commune devient obligatoire. L'enquête surplace parles soins de la commission n'est pas prescrite d'une manière absolue ; on évite ainsi au pétitionnaireun supplément de frais. Maisle travail du lever des plans, formalité secondaire jusqu'ici, devient une des parties essentielles de la procédure. Pendant toutes les opérations sur le terrain, tous les voisins ont le droit de suivre les travaux et d'exposer à l'Ingénieur leurs réclamations. Enfin, pour sauvegarder l'intérêt des paysans négligents ou ignorants, la loi prescrit, pour les concessions de terrains soumis à la loi rurale, une redevance obligatoire minimum de 10 p. 100 du produit, brut (*). (*) Le projet supprime également dans son premier article une anomalie juridique créée par la loi de 1904 : cette loi, nous l'avons vu, assimile le droit d'exploitation sur les propriétés privées à un droit réel mobilier. Or, d'après la loi de 1895, le droit d'exploiter le pétrole sur les propriétés de l'Etat participe aux dispositions générales de la loi des Mines : c'estdonc un droit réel immobilier. Ainsi le caractère juridique (lu droit d'exploitation varie suivant la nature du terrain où il s'exerce. Le projet de loi fait disparaître cette contradiction en spécifiant que le droit d'exploiter les terrains pétrolifères donnés en concession par 1 Elat, le district, les communes, les établissements publics ou les particuliers, est un droit réel mobilier.