Annales des Mines (1895, série 9, volume 8) [Image 312]

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NOTICE HISTORIQUE

SUR PIERRE-LOUIS-ANTOINE CORDIER.

élévation des températures centrales, aujourd'hui indiscutée, comme le résultat d'un refroidissement commencé depuis des millions de siècles et dont les effets mécaniques, conséquences de la contraction, jouent dans les dislocations de la terre un rôle permanent qu'il analyse savamment en s'efforçant avec une ingénieuse sagacité d'en montrer d'ineffaçables traces. Cordier avait épousé en 1817 Mue Borgella, nièce du savant Ramond, préfet du Puy-de-Dôme, botaniste zélé, météorologiste très sagace, célèbre surtout par une infa-

uni à tout ce que vous éprouvez pour votre chère et charmante nièce, dont le bonheur me paraît assuré par

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tigable ardeur apportée à l'étude des montagnes. Ne renouvelons pas, en prononçant ici son nom, la faute commise en 1812 par Delambre. « J'ai lu, écrivait Ramon(' à Cordier, ce que M. Delambre a dit de mon livre dans son compte rendu ; il m'a mentionné très honora-

blement et a eu l'intention de me traiter avec faveur, mais ce qui constitue mon travail est tout autre que ce qu'on a voulu voir jusqu'à présent. » L'occasion semble favorable pour produire cette rectification dans la salle même, je n'ose pas dire devant l'auditoire que Ramond trouvait inexactement informé. Ramond attachait un grand prix à l'exacte détermina-

tion des hauteurs par le baromètre; il y était devenu assez habile pour prédire, dans ses jours de gaieté, que dans l'avenir on verrait les conseils de révision remplacer la toise réglementaire par un baromètre placé sur la tête du conscrit. Ramond, depuis longtemps, avait apprécié les qualités solides et brillantes du coeur et de l'esprit de Cordier. Le mariage de sa nièce avec un tel ami fut une grande joie pour toute la famille. Le général La Fayette écrivait à Ramond : « Le mariage que vous m'annoncez avec un empressement si aimable remplit tous les voeux de mon amitié ; elle m'avait associé au sentiment, dont vous remplissez les tendres et saints devoirs. Je ne suis pas moins

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les nouveaux liens qui ne la séparent pas de vous. Mes filles et petites-filles, qui m'ont vu recevoir l'intéressante nouvelle, l'ont accueillie avec un cri de joie. » Cordier savait inspirer à tous la sympathie et la confiance. Humboldt lui écrivait, avec un épanchement de coeur dont jamais il ne fut prodigue : « Vous êtes du très petit nombre d'hommes supérieurs dont je puis m'approcher avec confiance quand un besoin du coeur me tourmente. »

Toujours digne sans être fière, la politesse de Cordier cachait, sous une apparence un peu froide, une bonté active et toujours prête; il ne promettait jamais. Ses réponses, toujours bienveillantes sans être banales, donnaient peu d'espérances à ceux qui s'adressaient à lui ; il disait les difficultés et discutait les objections, mais toute demande juste et raisonnable l'intéressait, il s'en occupait aussitôt et ne parlait de ses démarches qu'après le succès. Souvent même il prévenait les sollicitations ceux qui dépendaient de lui, surpris par une faveur inespérée, étaient heureux d'apprendre qu'ils la devaient à sa bienveillante sollicitude. Lorsque les employés du Muséum apprirent la gravité

de sa dernière maladie, la consternation fut générale; au respect et à la vénération pour leur excellent directeur s'alliait le sentiment d'une grande perte pour leurs

intérêts.

Une épouse charmante et aimée a donné à Cordier dix enfants dignes de leur amour, quatre fils et six filles. Mais le malheur ne perd jamais ses droits : deux de ses fils sont morts en bas âge; un troisième, à l'âge de seize ans, avait voulu par un long voyage se préparer à la carrière de marin : embarqué sur un navire de com-

merce, il était soumis à la discipline du bord. Le capi-