Annales des Mines (1877, série 7, volume 11) [Image 58]

Cette page est protégée. Merci de vous identifier avant de transcrire ou de vous créer préalablement un identifiant.

BIOGRAPHIE.

M. DE FRAINQUEVILLE.

la tribune étaient revus, analysés par ses chefs de service ou par lui, et classés dans sa tête avec un ordre admirable, Nous lui disions qu'il se rappelait ses examens de sortie de l'École polytechnique. Il se creusait la tête pour savoir sur quels points il pourrait bien être interrogé ; il cherchait et, pour parler le. langage de l'École, il piochait tous les cas possibles. Le grand jour arrivait; la loi était votée sans observation, ou sans observation comportant une réponse qui utilisât le labeur auquel M. de Franqueville et ses collaborateurs s'étaient livrés.

entreprises pouvaient offrir. Aussi, durant une influence administrative de plus de vingt ans, son modique patri« moine ne s'augmenta pas dans la plus légère proportion.... 11 ne laisse à ses enfants en son nom que ce qu'il avait luimême reçu en héritage, une somme de 6o.o oo fr. Quant à la fortune de sa femme et de ses enfants, bien plus attentif à la conserver irréprochable qu'à l'accroître, il évita soigneusement d'en rien placer sur aucune CC des entreprises formées en France et dont il aurait pu seconder ou seulement pressentir le succès. » Nous ne pouvons, à notre grand regret, pour louer dignement M. de Franqueville, trouver des termes aussi délicats; la plume de M. Villemain ne se transmet pas, mais

96

Probité. - Un dernier mot. Faut-il parler de la probité de M. de Franqueville ? J'ai longtemps hésité à le faire ; il me semblait que c'était presque faire injure à sa mémoire.

J'ai parcouru un grand nombre de notices consacrées à d'éminents ingénieurs des ponts et chaussées ou des mines,

jamais on n'a songé à dire qu'ils avaient été de très-honnêtes gens; la chose est trop naturelle. J'ai cependant trouvé une exception à ce silence si général. Voici en quels termes, dans une notice trop peu connue (*) et à laquelle nous avons déjà emprunté quelques lignes, un grand écrivain parle d'un grand administrateur; 1.701C,1 ce que M. Villemain écrivait de son condisciple, l. Legrand « Jamais homme ne porta plus loin et ne maintint pour soi avec plus de scrupule ce désintéressement qui, sans doute, est un devoir, niais qu'on peut, à cause des exempies contraires, nommer souvent une vertu. Contribuant à la répartition de tant de secours et parfois de faveurs,

consulté à l'origine pour la direction de tant d'entreprises, Legrand, sous aucun prétexte, sous aucune forme, « ne voulut jamais accepter, ni même acquérir à titre direct

ou indirect la moindre part dans les avantages que ces (*) Biographie générale, publiée par M. Didot.

97

f(

nous dirons

A une époque pendant laquelle faire fortune a été le but suprême pour bien des gens, un ingénieur a traité pendant quarante années les plus grandes affaires industrielles de son pays ; il a rédigé de. sa main des conventions relatives à des travaux qui ont coûté plus de io milliards de francs. Les combinaisons financières que cet ingénieur a imagi-

nées, soutenues à la tribune, ont sauvegardé la fortune d'un nombre immense de familles. Cet homme de bien a laissé à son fils 5. 000 livres de rente représentées par un grand nombre de titres. Quand M. de Franqueville avait économisé 2.000 francs, il achetait uoo francs de rente.

Voilà ce qu'ont été, au siècle des manieurs d'argent, M. Legrand et M. de Franqueville.

La probité de M. de Franqueville était, du reste, universellement connue, et, pour lui rendre hommage, on s'est

servi un jour d'une expression bien forte. Après avoir dit qu'il repousserait des demandes de concessions nouvelles faisant double emploi avec des chemins existants, le directeur général ajoutait qu'il n'était nullement hostile aux Personnes, mais qu'il n'avait qu'une ligne de conduite suivre ce qui lui paraissait être l'intérêt du pays. Nous ne TOMB Xi, 1877.