Annales des Mines (1866, série 6, volume 10) [Image 73]

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« Les murailles et les voûtes, détériorées par le temps, fournissent aussi leur contingent d'humidité. Plusieurs, situées au voisinage des égouts ou clos cours d'eau, présentent à leurs parois un suintement fétide. « La malpropreté et l'incurie des habitants viennent concourir aussi pour leur part à accroître les conditions funestes de pareils « séjours.

« c'est là que la Commission a rencontré parfois les misères les « plus profondes et la malpropreté dans une mesure extrême: des « ouvriers ne gagnant qu'un très-modique salaire, chargés d'enfants « et devant se loger au plus bas prix possible. « Plusieurs caves sont occupées par de petits marchands de légumes et de fruits dont les débris, subissant un commencement « de putréfaction, ajoutent encore leurs miasmes délétères à l'air déjà vicié par la concentration. « Mais à côté de ces caves d'une insalubrité si flagrante, il en est

« d'autres dont les conditions sont un peu moins défavorable. « Celles-ci sont situées dans des rues plus larges et mieux aérées; « l'ouverture d'entrée est moins étroite, les marches sont moins rapides, de véritables fenêtres souvent vitrées les garantissent contre les eaux du ciel et permettent l'accès d'un peu de lumière, « le soleil peut même parfois y hasarder un rayon ; dans quelques-

unes se rencontre une cheminée. Mais là aussi l'atmosphère, altérée par la concentration, présente également des conditions incessamment nuisibles à la santé des habitants. « Enfin il en est quelques-unes qui, par un privilège exceptionnel,

sont pourvues, à l'extrémité opposée à l'ouverture d'entrée, de lucarnes ou même de fenêtres qui permettraient d'établir, au « Moyen de courants, un renouvellement fréquent de l'atmosphère « souterraine, Pour celle.-ci encore, les conditions de salubrité sont loin d'être satisfaisantes. La Commission en a rencontré « quelques-unes qui présentent au fond de véritables fenêtres, « s'ouvrant dans des cours parfaitement aérées, et elle n'a pas hé« sité à les maintenir, provisoirement du moins, comme habitations. « Mais à côté de celles-ci, fort rares d'ailleurs, elle en a visité un « grand nombre dont les ouvertures opposées à rentrée communi-

quent avec des cours étroites, souvent malpropres et infectées par des latrines en très-mauvais état. ici l'air nouveau, loin de concourir à la salubrité de la demeure souterraine, devient, au contraire, une nouvelle cause d'infection, et, dans de pareilles « conditions, les ouvertures, presque toujours d'ailleurs tenues fermées par les habitants, doivent être considérées comme inexis-

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tantes ; et bien qu'il soit arrivé souvent que les propriétaires se soient prévalus de leur présence pour témoigner de la possibl, lité d'une aération suffisante, la Commission n'a pas cru devoir accepter comme fondés de pareils motifs, mais a dû n'envisager que les considérations de la santé, toujours gravement compromise dans de pareils lieux. « Une dernière remarque à propos des caves habitées doit, ce semble, trouver ici sa place. « La Commission a eu l'occasion de visiter, clans les communes « annexées, un certain nombre de demeures d'ouvriers, et elle a vu avec un extrême regret, dans des cités de construction récente, « des caves disposées dans le but évident d'être louées à titre d'ha« bitations. « Bien que présentant des conditions moins l'acineuses que celles de l'ancien Lille, bien que creusées moins profondément clans le

sol et pourvues de fenêtres relativement assez larges pour permettre, dans une certaine mesure, l'accès du jour et de la lumière « solaire, elles partagent néanmoins tous les vices inhérents aux « demeures souterraines humidité habituelle des murailles, des « voûtes et surtout du sol, impossibilité du renouvellement coinplet de l'air par l'absence 'd'ouvertures à des points opposés; elles présentent en outre une exiguïté telle que, fussent-elles dans d'autres conditions, ces pièces n'offrent pas un cubage suffisant pour y permettre la résidence continue d'une famille, et, par ce seul motif, elles devraient encore être interdites comme habi:

tations.

« Tel est donc l'état des caves occupées, à Lille, à titre de de« meures. » Un peu plus loin, la Commission ajoute qu'une nouvelle et puis-

sante cause d'insalubrité, qui vient s'ajouter à toutes les autres, c'est l'encombrement. « Pour en citer, dit-elle, un exemple entre plusieurs, que la Commission a constaté il y a quelques jours, elle a vu, dans un cabaret, une cave de 90 mètres cubes et ren« fermant 1.i lits occupés chaque nuit par '2 individus. Il y avait « clone là, pour la respiration de chacun d'eux, pendant 8 ou 9 heu-

res, à mètres cubes d'air. Il doit paraître superflu d'ajouter que la Commission, d'un avis unanime, a proposé l'interdiction immédiate de cette cave à titre d'habitation.»