Annales des Mines (1859, série 5, volume 16) [Image 299]

Cette page est protégée. Merci de vous identifier avant de transcrire ou de vous créer préalablement un identifiant.

574

BULLETIN.

BULLETIN.

moyens employés par les mineurs, on ne parvient que difficilement à recueillir plus de la moitié du métal précieux que le sable contient. indépendamment de l'or, les sables et les

galets qui sont lavés par les mineurs renferment des grenats, des cornalines, des agates et quelques petits fragments d'une gemme fort dure et d'un beau vert. Ce sont probablement des débris d'émeraudes. De plus, on rencontre partout une plus ou moins grande quantité d'iridium, de platine et de

rhodium. Dans certains endroits, on trouve presque autant d'iridium que d'or. Cet iridium est métallique, blanc, luisant, fort lourd (2. à 21), très-dur, et il ressemble à du sable un peu aplati ayant les angles arrendis par le frottement. L'or disséminé dans le détritus de la plage provient d'une couche d'alluvion qui se rencontre tout le long de la côte. La mer, en brisant contre la falaise, la ronge peu à peu; la partie légère des débris est enlevée par les courants, de façon que les corps lourds s'enfouissent dans le sable. Quand la mer est agitée, ils descendent peu à peu jusqu'à ce qu'ils rencontrent la couche solide et profonde qui n'est pas bouleversée par le ressac. Du reste il suffit d'examiner avec soin la couche d'alluvion de laquelle je parle, pour être convaincu de la justesse de ce que j'avance. On y rencontre, mais beaucoup plus diffuses, toutes les substances pesantes que l'on trouve enfouies dans la grève. On ne peut miner dans l'Orégon que depuis avril jusqu'à la la fin d'octobre. A cette époque, la brise NO cesse: les tempêtes

commencent; les eaux qui pendant l'été n'arrivaient, même à haute mer, que loin de la falaise, viennent alors furieuses semer sur la côte des gerbes d'écume jaillissant à Go mètres de haut. La lame s'engouffre dans les cavernes et dans les anfractuosités des rochers. L'océan Pacifique est furieux ; c'est

comme une bataille durant laquelle on entend :partout et à chaque instant des détonations puissantes et sourdes comme celles du canon de gros calibre. Tous les travaux de l'été sont nivelés, et au printemps suivant on est obligé, pour retrouver la propriété de chaque mineur, dc prendre des alignements d'après des jalons plantés à cet effet sur le haut de la falaise. La plage aurifère s'étend depuis Crescent-City jusqu'à Ump-

quona. Crescent-City est sur la plage; c'est une méchante bourgade mal bâtie en planches, mal située, sans rade ni port. Au nord de Crescent-City, à 50 milles, est le renommé Golcl-

575

Bluff ( Bluff, prononcer bleuf pour falaise). Cette plage a été et restera riche. A chaque marée basse, après chaque tempête, le rivage est couvert d'une couche de sable noir composé de titanate de fer mêlé d'or. On ramasse soigneusement ce sable,

on le transporte dans de grands réservoirs où il est brassé avec du mercure, puis on le lave sur des plans inclinés. Tou-

jours en allant vers le nord, on rencontre Rogue-Rive (rivière des coquins). Il y a eu là des sables d'une richesse fabuleuse. J'y ai vu des mineurs ramasser de 5o à 90 grammes d'or par jour et par homme, en lavant sur des plans inclinés et en perdant au moins /5 du métal précieux. Jusque-là on trouve peu de platine et d'iridium. Entre Rogue-Rive et Fort-Orford, la. côte est moins riche et peu travaillée. Fort-Orford est une station militaire qui a pour but de contenir les Indiens. A 200 mètres au sud de ce fort, la

plage a été extrêmement riche. On commence à trouver ici 15 p. 1.0 d'iridium sur la totalité du métal récolté. Depuis Fort-Orford jusqu'au Cap-Blanco ( ainsi nommé à cause de sa couleur), les sables ont été très-riches. Là, surtout, j'ai rencontré sur la plage une foule d'agates et de cornalines aux formes et aux couleurs les plus variées. Presque toutes ces pierres sont polies, et quelques-unes ayant la forme d'un cabochon semblent sortir des mains du lapidaire. Depuis le Cap-Blanco, en allant toujours vers le nord, l'or commence à se montrer en parcelles plus petites, plus aplaties. On ne rencontre plus que rarement des grains arrondis.

A Coquille, les paillettes sont tellement légères que le moindre souille les enlève, et entre les deux stations, on trouve environ 45 p. 100 d'iridium avec 5 p. Ioo de platine. A Itandorph, l'or change d'aspect, et sauf la couleur et le poids, on le prendrait pour du gros son de blé. Depuis ce point jusqu'à Cap-Arago, il est extrêmement léger et divisé en minces paillettes. Ce métal est mêlé à 70 p. 100 d'iridium et 12 p. 200 de platine.

De là, vers timpquona, l'or est plus ténu encore; il ressemble à do la poussière dont on sent à peine le grain sous le doigt. Je n'ai pas pu me rendre compte exactement de la quantité de platine et d'iridium qu'on obtient sur cette partie de la côte, mais je suppose qu'il y a environ Go p. 100 d'iridium et 6 ou 8 p. Dao de platine.

Il est à remarquer que depuis Crescent City jusqu'à Ump-

1