Annales des Mines (1891, série 8, volume 19) [Image 211]

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376 NOTICE NÉCROLOGIQUE SUR ÉDOUARD PHILLIPS.

Par tous ses travaux, touchant aux diverses branches de la mécanique, par les importantes déductions qu'il avait tirées de ses recherches, enfin par ses fonctions d'ingénieur au service de l'État, puis des compagnies de chemins de fer, fonctions qui le mettaient à même de bien voir le rôle capital des théories scientifiques dans la pratique des constructions mécaniques, et en même temps les exigences spéciales de cette pratique, Phillips se trouvait admirablement préparé pour l'enseignement que lui confièrent des administrateurs éclairés, à l'École centrale,

puis à l'École polytechnique. Nous touchons ici à l'une (les parties les plus fécondes de son oeuvre; mais les fruits de ses efforts ne sont plus des mémoires, des livres que nous puissions encore étudier : ce sont les connaissances qu'il a données à ses élèves. Qui peut dire le service que rend à son pays un bon professeur, surtout lorsqu'il s'agit d'une science aussi délicate que la mécanique, où les erreurs sont si faciles à commettre, si difficiles à

redresser, quand on n'en connaît pas à fond les principes? Chaque année des centaines d'élèves quittent nos grandes écoles. Est-il indifférent qu'ils en emportent des connaissances nettes et précises, une bonne méthode, le goût de la science, ou au contraire des notions confuses et obscures et le dédain des études qu'ils ont dû faire? Sous ce rapport, l'influence personnelle du professeur est grande, et les examinateurs qui interrogent les élèves à

la fin de leurs études le remarquent bien vite. Que de travaux ensuite se produisent, qui n'auraient pas vu le jour, si une graine fertile n'avait été semée par le professeur ; et puis, dans l'exercice de la tâche quotidienne de chacun, quelle est l'importance d'un jugement sain, et de connaissances bien ordonnées! Nous pouvons nous en rendre facilement compte, en remarquant avec quelle peine au contraire nous suppléons à l'enseignement d'une science qui nous a manqué, ou qui était insuffisant.

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Phillips n'était pas seulement très savant, il était aussi très bon professeur : ses élèves n'ont pas oublié avec quel soin il préparait toujours ses leçons, avec quelle clarté il les développait. Nous regrettons vivement aujourd'hui qu'il n'en ait pas composé un ouvrage qui nous resterait. Les fragments rédigés de ses leçons que nous possédons sont en effet incomplets et insuffisants ; les feuilles autographiées à l'École polytechnique ne donnent

pas une idée juste de son enseignement ; un travail un peu plus important est son Cours d'hydraulique et d'hy-

drostatique, rédigé en 1875 par M. Gouilly, son répétiteur àl'École centrale : c'est un bon traité élémentaire, simple

et clair dans toutes ses parties. Mais, je le répète, ce n'est pas dans les livres que Phillips, véritable professeur, a laissé le souvenir de ses leçons, c'est dans l'esprit de ses nombreux élèves.

Nous arrivons au terme de notre revue des travaux du savant que nous regrettons : nous pouvons encore citer de nombreux rapports qu'il a rédigés sur divers mémoires soumis à l'Académie (*), les discours qu'il a prononcés aux obsèques de ses collègues Bresse et Rolland (**), sa notice sur de Saint -Venant (***), ses allocutions aux

congrès qu'il a présidés en 1889, peu de mois avant sa mort.

Nous devons aussi rappeler ses travaux techniques comme ingénieur de chemins de fer, à une époque où bien des types du matériel étaient encore à créer ; il prit une part active à la construction des locomotives et des Véhicules de transport, et il eut toujours soin de créer desarchives contenant les dessins complets du matériel construit. (*) Comptes rendus, t. LXXI, p. 72; t.1,XXVI, p. 528; t. LXXXII, P. 362; t. LXXXIV, p. 72; t. CIV, p. 657. (**) Comptes rendus, t. XCVI, p. 1518; t. C, p. 947. (***) Comptes rendus, t. CII, p. 141.