Annales des Mines (1886, série 8, volume 10) [Image 71]

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ÉLOGE DE M. CHARLES COMBES.

ÉLOGE DE M. CHARLES COMBES.

de s'enrichir. Saint-Étienne lui fut un asile. Il regrettait la vie studieuse et tranquille du professeur. L'École re-

fondeurs de la mine et les ramener sans fatigue. Beaucoup de savoir ne suffit pas. Dans l'abondance des faits

grettait ses leçons : on fut prompt à s'entendre, une chaire lui fut confiée. Par une heureuse rencontre, la

enchaînés avec soin, le professeur doit choisir avec . droiture d'esprit et se borner avec désintéressement. Instruit de tous les détails, savant à calculer, habile à bien dire, poussé du zèle d'être applaudi par ceux qu'il

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direction d'une mine de houille située près de la ville se trouva vacante. Les tâches se complétaient. La théorie était le guide, la pratique le but, l'application servait de contrôle et d'exemple. La vigilance de Combes n'a pas laissé de traces. Les archives de la mine de Firminy conservent exactement, depuis l'origine, le récit des explosions et des sinistres

de tout genre. De 1828 à 1831, toutes les pages sont blanches. La responsabilité cependant était terrible. L'asphyxie,

il y a cinquante ans, faisait, dans les galeries de mine, plus de victimes que les explosions. Les mineurs s'appelaient, comme les sentinelles d'une place assiégée, prêts à courir dans l'ombre au secours du camarade dont la voix s'éteignait. Combes, pendant toute sa carrière, a poursuivi avec persévérance le grand problème de l'aérage des mines : nul n'a mieux réussi à épargner à d'autres les hésitations et les craintes dont chacune lui rappelait plus d'une nuit sans sommeil. Appelé par ses maîtres à l'École des mines de Paris, Combes y apporta, avec ses traditions d'élève, l'autorité et le langage d'un professeur sûr de lui. L'enseignement

embrassait l'art et la science du mineur. Après avoir deviné sur des indices ou jugé sur des preuves, de la présence ou du voisinage d'un minerai, un ingénieur ha-

hile, sans se soustraire aux émotions du hasard, doit accroître les chances, écarter les dangers, décider la grandeur et la direction des galeries, le diamètre des puits, suivant le terrain, choisissant le meilleur, soutenir avec la pierre ou étayer avec le bois, refouler les eaux,

entraîner les gaz, descendre les ouvriers dans les pro-

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doit instruire, il peut soulever d'inutiles problèmes, discourir de questions ingénieuses , et pour faire de belles leçons, viser au-dessus du but. Nulle pensée chez Combes que pour ses élèves. Tendant à la pratique, montrant ses richesses sans confusion, sa science sans empressement, il s'élevait sans faire bruit de ses ailes. Combes enseignait pendant six mois, il se préparait

toute l'année. De fréquents voyages, travail et repos tout ensemble, renouvelaient pour lui les joies de la mission d'élève. Admis à tout voir, il voulait tout comprendre ;

exercé aux calculs et aux mesures, il expliquait les anciennes pratiques, distinguait l'expérience de la routine et rapportait le progrès. Excellent voyageur, il savait tout regarder, tout interroger, admirer quelquefois et s'étonner à propos. Le manège d'un puits d'extraction enrichit un jour ses notes de voyage d'un doute souvent cité depuis. La benne dans laquelle on charge le charbon, est enlevée par une lourde chaîne. Chaque pas , en l'enroulant, la raccourcit et diminue le fardeau de S chevaux. Pendant la descente ils demeurent sans action ; les arrêts enfin sont fréquents. Rien n'est plus éloigné du régime uniforme dont les avantages sont classiques. Le travail cependant dépasse le maximum annoncé. Faut-il en faire honneur à des bêtes de choix bien étrillées et bien nourries ? Faut-il douter de la règle ? Conseiller aux charretiers de réparer par des haltes fréquentes les forces de leur attelage? Le fait est bizarre : Combes, témoin judicieux, le rapporte sans y mêler aucun raisonnement ets'abstient prudemment de conclure. Tome X, 1886.

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