Annales des Mines (1862, série 6, volume 2) [Image 333]

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TERRAINS.

EXTRAITS DE GÉOLOGIE POUR L'ANNÉE [861.

ils vivaient. Toutefois elle fournit des points de repère assez précis, d'après lesquels M. Lartet propose de subdiviser cette période en quatre époques. La plus ancienne est celle où ont été formés les dépôts des cavernes les plus inférieurs. On y trouve des ossements de grands carnassiers, et en particulier ceux de l'ours des cavernes (Ursus spelaeus), de l'hyène et du tigre (Hyaena spelaea, Felis spelaea, etc.). Une seconde époque est celle pendant laquelle se sont déposées les plus grandes étendues de graviers stratifiés. Elle est caractérisée par l'apparition du Mammouth ou Elephas primigenius. M. Lartet

la fait durer jusqu'à l'extinction de cette espèce, dont les ossements en deviennent ainsi parfaitement caractéristiques. Le

Rhinoceros tichorchinus accompagne en général l'éléphant et disparaît avec lui. Il en est de même de l'hippopotame fossile et du grand cerf d'Irlande (Megaceros hibernicus), au moins pour le centre de l'Europe.

La disparition de ces grandes espèces est certainement le fait paléontologique le plus grave que l'on puisse citer dans l'histoire de la période quaternaire, et il est bien probable qu'elle peut servir utilement de jalon. Des deux autres époques, celle que M. Lartet désigne comme la troisième est caractérisée en ce qu'elle renferme les dernières traces du renne, et la quatrième en ce qu'on y trouve, pour la dernière fois, l'aurochs (Bison europus) et l'urus (Bos primigenius). Ces trois espèces nous paraissent avoir eu une histoire assez semblable. citées toutes les trois par Jules-César, deux d'entre elles

vivent encore : l'aurochs en Lithuanie et le renne en Laponie. A laquelle de ces deux phases peut-on rapporter l'apparition de l'homme en Europe? M. Lartet n'hésite pas à reconnaître dans toutes

des traces de son existence, et à faire remonter, par conséquent, cette apparition à l'origine même de la période quaternaire (1). Toutefois, les conclusions de MM. Pic t et et Lartet ont été en partie combattues par M. D eso r (2). Suivant lui, toute la faune et la flore actuelle n'auraient pas existé dès l'origine de la période diluvienne. Il y a eu certainement des extinctions, et elles sont attestées par les débris de Mammouth, d'Ursus spelus, de Rhinoceros tichorinus; mais, d'après M. Des or, la faune actuelle au(t) Bibliothèque universelle, 1861; XII, 203. - Extrait du mémoire de M. Lar-

tet, par M. Pictet.

(2) Des modifications que les faunes terrestres et lacustres ont subies pendant la période quaternaire. (Reponse à M. Pic t e t.) 1861.

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rait été complétée à plusieurs reprises par l'intervention du

Créateur, et la vie se serait manifestée sous des formes nouvelles, toutes les fois que des conditions nouvelles d'existence auraient

surgi.

Nous ajouterons, en terminant, que les conclusions déduites de

la découverte de M. Boucher de Perthes ont même été compiétement contestées, notamment par MM. E. Robert (1), de Ben ing sen-Ford er, et surtout par un géologue illustre, M. É lie de Beaumont (2), qui ne regarde pas comme démontré, quant à présent, que les silex taillés de la vallée de la Somme ou de la Seine aient été extraits du terrain diluvien non remanié. Habitations lacustres. Les habitations lacustres des lacs de Suisse et d'Italie ont vivement attiré l'attention depuis plusieurs années; C'est, il y a huit ans environ, dans le lac de Zurich qu'on en a trouvélespremières traces; d'anciens pilotis furent découverts et la quantité d'ustensiles de pierre et de bronze disséminés à l'entour firent supposer que des peuplades très-anciennes avaient construit des habitations sur les lacs, comme le font encore certains naturels de l'océan Pacifique et comme Hérodote le raconte des

habitants de la Thrace. De même que dans le Danemark, on a rapporté les plus anciens produits de l'industrie humaine à trois périodes distinctes, l'âge de pierre ou âge primitif, l'âge de bronze et l'âge de fer. On a pu, en Suisse, distinguer les stations où l'on ne retrouve que des objets

en pierre, en corne, en os ou en bois (Mônchenbuchsée, Meilan sur le lac de Zurich, Concise) ; celle oè les objets sont en bronze ( Gortaillod, Auvernier, Bevaix , Corcelettes, Chevroux , Estavayer, Port-Alban). Enfin les ustensiles de fer et de terre n'ont été trouvés encore que dans une seule localité. De pareilles découvertes seraient plutôt du domaine de l'archéologie que de la géologie, si l'on n'observait de nombreux ossements d'animaux partout où d'anciens pilotis marquent la place du séjour de l'homme. M. le professeur II tim eyer (3) de Bâle, n'indique pas moins de vingt-huit espèces de mammifères qu'il a déterminés. Ce sont :

l'ours, le blaireau, la fouine, la marte, le putois, l'hermine, la (I) E. Ro hot t. Comptes rendus, 1861; LUI, 63,455, 812. Comptes rendus, 1861; LH, 1133. Lettre de M. Bo ucher de Perthes à

M. E. de Beaumont.

Die Patata der P fahlbauten in der Schweiz.

Bile, 1861.