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Un conflit imminent au coeur de la vie des élèves

Lazzis mineurs. Revue en 3 actes.

Couverture de la revue des élèves de 1909.

Des élèves dans la peau de soldats

La préparation à la guerre prend une place prépondérante dans la vie des élèves. 

En 1908, l'ensemble des élèves reçoit des vêtements militaires. Les élèves n'ayant pas effectué leur première année de service avant d'entrer à l'École se voient remettre les effets de soldats tandis que les autres peuvent prendre ceux de sous-officiers.

L'équipement complet d'un soldat d'artillerie comprend :

  • un « bourgeron » ( une veste courte) en toile.
  • une cravate en coton.
  • un pantalon et une veste d'artillerie.
  • une « capote » (un manteau long).
  • un képi.

Les sous-officiers ont droit à des épaulettes et à des boutons galonnés d'or. Le port de l'uniforme est obligatoire pendant les exercices pratiques de l'instruction militaire. En ce qui concerne les conférences et les cours théoriques, les élèves obtiennent finalement le droit de garder leur habit "bourgeois".

Dans la revue éditée chaque année par les élèves, on trouve des chansons et des dessins qui reflètent leur quotidien : caricatures du corps enseignant, satires des différents cours, regard sur les évènements politiques. Ici, sur cette couverture de 1909, on voit des élèves polytechniciens en grand habit d'officier d'artillerie, au milieu d'autres élèves, en costume marin, peut-être représentant les ingénieurs civils.

La revue du 14 juillet 1909

Les élèves participent également à des manifestations nationales mettant en scène l'armée. En 1909, le Ministère de la Guerre adresse un lot de cartes d'invitation à l'École pour qu'ils puissent assister à la revue du 14 juillet à Longchamp. Il s'agit d'un privilège qui garantit aux élèves de profiter de la revue dans les tribunes où le nombre de places est limité.

Pour la première fois cette année là, les spectateurs peuvent admirer le vol de deux ballons dirigeables mis à la disposition de l'armée pour la surveillance des frontières, le "Ville-de-Nancy" et le "République". Ils assistent également au passage des élèves de l'École polytechnique "dont l'alignement est impeccable" écrit un journaliste du Petit parisien dans le numéro du 15 juillet 1909.

Le patriotisme est de rigueur...

En 1913, les élèves composent pour la revue annuelle une chanson anti-alllemande intitulée « Le mal de Rhin » dans laquelle ils laissent éclater leur patriotisme. Les clichés sur le caractère et le physique germanique sont largement représentés. Les élèves fustigent également l'importation de leurs produits manufacturés, omniprésents sur le marché français, comme les "talons tournants" (c'est-à-dire des talons en caoutchouc) et les "courroies d'valise". Dans le troisième couplet, il y a aussi une référence à l'aviation allemande désignée par les « oiseaux à fuselage » qui menacent le ciel français. 

Juste après le chant patriotique, un autre poème, intitulé le "Pas d'arme de Poincaré" fait référence à l'élection présidentielle française qui a eu lieu en janvier de la même année. Là encore la référence militaire est présente dans le texte : " Vite en guerre/commencez!".

 

...mais l'École maintient une tradition germanophile

De par l'importance historique de l'industrie minière allemande, les élèves de l'École nationale supérieure des mines ont été encouragés à apprendre la langue de Goethe et le vocabulaire technique relatif à la science minière. Au début du vingtième siècle, les liens entre l'École et le monde scientifique et universitaire allemand sont encore très étroits. Depuis la réforme de l'enseignement des langues vivantes en 1903, les élèves ingénieurs civils de l'année préparatoire doivent effectuer un stage de deux mois en Allemagne ou en Angleterre.

Durant ce stage immersif, les élèves, qui logent la plupart du temps dans des pensions de famille, font de rapides progrès linguistiques. Ils fréquentent assidûment des étudiants et des professeurs, assistent parfois à des cours, visitent des musées, des sites industriels ou des mines.

La majorité des élèves choisissent de partir en Allemagne, en particulier en Bavière (Munich, Nuremberg, Augsbourg) dans le grand-duché de Bade (Karlsruhe) ou dans le Wurtemberg (Stuttgart). Généralement bien accueillis, ils découvrent les coutumes et mœurs allemandes, et la réalité est parfois éloignée des discours de propagande. 

Henri de Charentenay, qui effectue son voyage linguistique à Munich en 1909 conclut son "rapport" (bref résumé de son séjour et de son emploi du temps) par cette phrase éloquente :

"Je termine en disant que ce voyage ne m'a pas profité seulement au point de vue de la langue, mais m'a élargi les idées, en me mettant en contact avec une race, sans doute ennemie de la notre, mais qui possède cependant de grandes qualités ; et depuis mon retour, je suis souvent tenté de croire que les allemands, du moins les bavarois, car je n'ai vu que ces derniers sont quelquefois jugés avec beaucoup de sévérité".

Ce stage obligatoire disparaît en 1913.

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