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La science minière

[Das Bergbüchlein]

Dans l'histoire des sciences minières et pour les bibliophiles, notre « petit livre bien ordonné » occupe la place très émouvante réservée à tous les premiers livres publiés dans un domaine ou dans une science.

Il est encore tout englué dans les conceptions cohérentes, mais non scientifiques, du Moyen Age. Il n'envisage de savoir théorique qu' alchimiste. D'après le texte, la formation des minerais repose sur les éléments suivants :


« Il est à remarquer que pour la croissance ou génération d'un minerai métallique, il faut un géniteur et une chose soumise ou matière qui soit capable de percevoir l'action génératrice. Le géniteur général de toute chose, du minerai et de toutes choses qui naissent est le ciel...L'influence du ciel se multiplie par le cours du firmament et la rotation des sept planètes. C'est pourquoi chaque minerai métallique reçoit une influence toute particulière de sa propre planète. et d'après sa conformité en chaleur, froid, humeur et aridité. Ainsi l'or s'est fait par le Soleil, l'argent par la Lune, l'étain par Jupiter, le cuivre par Vénus, le fer par Mars, le plomb par Saturne, le vif-argent par Mercure... Mais la chose soumise ou la matière générale de tous les métaux, est selon l'opinion des sages, un soufre et un mercure, qui par le cours et l'influence du ciel, doivent être purifiés et consolidés en un corps métallique ou en un minerai. Aussi quelques-uns sont d'avis que, par le cours et sous l'influence du ciel, par ce soufre et ce mercure, des vapeurs ou exhalaisons dites exhalaisons minérales sont attirées des profondeurs de la terre et en émanent dans les filons ou les fentes, où elles sont transformées en minerai.... Quoique les influences du ciel et la propriété des matières concernent la génération de chaque minerai ou métal, cependant elles ne suffisent pas pour que la naissance des minerais puisse se faire commodément. Mais il faut une qualité propre d'un vase naturel comme les filons, dans lequel le minerai soit engendré. »

Le texte est écrit en langue vulgaire, à destination des praticiens. A part les idées alchimistes, il repose sur des connaissances certaines des terrains et des coutumes : tant les associations de minerais que les délicats problèmes de répartition des parts minières.
Et cependant, cet ouvrage, par la nature du sujet abordé, très technique, l'utilisation de l'écrit pour la transmission du savoir, sa présentation stricte et systématique, ainsi que certains aspect des gravures, annonce déjà le livre humaniste technique.

Bien naturellement, la comparaison qui s'impose est avec le De Re Métallica d'Agricola de 1556, son successeur direct...de même origine géographique et est également rédigé par un médecin.
Mieux organisé, mieux élaboré, s'attachant à la compréhension rationnelle des phénomènes et méprisant les alchimistes, l' Agricola atteste du changement, en cinquante ans, du type de regard porté sur le monde ; mais ce changement, de fait, prend effet plus tôt, puisque la rédaction de cette somme aurait débutée vers 1529, et qu'en 1530, parait le Georgii Agricolae Medici Bermannus, sive de re metallica, ouvrage de 130 p. lui aussi un dialogue, mais entre savants ; et qu'en 1546 De ortu et causis subterraneorum qui traite en particulier de la formation des montagnes et des minerais métalliques du même auteur, précède également son ouvrage le plus célèbre.


La réflexion humaniste moderne sur l'art des mines recouvre en fait chronologiquement la plupart des éditions du « Bergbüchlein » et mettra longtemps à pénétrer dans un milieu plus populaire, néanmoins suffisamment éduqué pour accéder à l'écrit.

Le Bergbüchlein, situé donc à la frontière de deux mondes, est un livre important pour l'histoire des mines métalliques. Il illustre aussi remarquablement, à cause du peu d'exemplaires conservés malgré un succès que prouve la liste des éditions, le principe suivant, bien connu des bibliophiles : de petits ouvrages modestes, et qui ne sont pas destinés aux savants, disparaissent plus vite du patrimoine que de belles éditions figurant dans les grandes bibliothèques.

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